- Centro de Rio
- La rando du Cristo
- Les fabuleuses cataractes d’Iguazu
- Ilha Grande, la plage en mode randonnée
- Quiétude amazone à Marajo
- L’expérience Manati Lodge au cœur du lac Acajatuba
- J’irai dormir sur l’Amazone
- Alter do Chao et ses plages de sable blanc
A peine débarqué à Manaus en provenance de Belem, je file directement en taxi sur le quai principal pour acheter les billets de croisière pour Santarem et négocier une cabine privée pour deux (camarote). En effet, ma sœur Isabelle me rejoint demain pour découvrir l’Amazonie en ma compagnie et c’est depuis cette ville improbable que nous allons nous lancer dans la descente du plus grand fleuve de la planète. Départ prévu le 21 juillet après notre séjour au Manati Lodge.


Un peu plus tard, j’arpente les rues d’une ville bouillonnante et pleine de charme, qui a su conserver ses somptueux édifices et quelques belles demeures coloniales.



Au cœur de la jungle amazonienne, Manaus est devenue une métropole tentaculaire de plus de deux millions d’habitants, la plus grande d’Amazonie avec un trafic infernal, des gratte-ciels et des centres commerciaux modernes. La ville a connu son âge d’or au XIXème siècle avec la culture du caoutchouc. Aujourd’hui, elle constitue l’un des principaux pôles industriels du Brésil depuis la création de son statut de Zone Franche. D’ailleurs, la majorité des 20 millions d’habitants de l’Amazonie brésilienne vivent désormais en ville.


Au détour d’une rue, je tombe sur le Teatro Amazonas, le fameux « Opéra de la jungle« .


Ce théâtre insolite témoigne de la splendeur passée de Manaus, la belle époque où la production et l’exportation du caoutchouc faisaient la richesse de la région et sa renommée dans le monde entier. La bourgeoisie vouait alors un véritable culte à la mode française et rêvait d’un Opéra Garnier en Amazonie. Il aura fallu près de 15 ans de travaux pour réaliser une telle œuvre en pleine forêt amazonienne.




Comme prévu ce 17 juillet vers 13h, je vais chercher ma sœur Isabelle à l’aéroport en provenance de Rio. J’y retrouve également Marilia Costa, la propriétaire du Manati Lodge. C’est elle en personne qui va nous conduire dans un véritable paradis minéral et végétal, en immersion totale dans la forêt amazonienne. Un lieu qui s’avèrera féerique et fascinant.

Nous prenons la route en direction de la petite localité d’Iranduba, située à 25 km de Manaus. Ce qui nous donnera l’occasion de traverser le magnifique pont Rio Negro. Marília est une jeune femme délicieuse et pleine d’entrain, qui parle un excellent français. Son approche est tournée vers un tourisme solidaire et responsable, dans le respect des gens et l’amour de son environnement qu’elle entend préserver. Non loin d’Iranduba, la voiture s’immobilise au bord de la route. Nous sommes au milieu de nulle part ! Nous attendons tranquillement la lancha qui va prendre le relais pour nous conduire au Manati Lodge. Et déjà la tête d’une drôle de bête émerge de l’eau à deux mètres de nous : un serpent ou un iguane… L’aventure peut commencer !

Quelques minutes plus tard, nous embarquons dans une pirogue à moteur, et nous filons sur l’eau par l’un des nombreux igarapés tentaculaires du Rio Negro, petits bras de fleuve étroits serpentant le long des berges.

D’entrée de jeu, la magie opère. Il fait un temps splendide, le ciel s’est paré d’un bleu lumineux, les arbres et les nuages blancs se reflètent dans l’eau paisible du lac comme dans un miroir, et nous empruntons parfois des “raccourcis” dans l’obscurité de l’épaisse forêt inondée de l’Igapos. Une explosion de couleurs verdoyantes, de sons suspects et de senteurs inattendues nous plonge avec délectation dans la féerie du fleuve noir et de la forêt verte.

Au bout de 30 minutes de navigation, nous apercevons le Manati Lodge, une « maison flottante » isolée et nichée dans un étroit igarapé du lac Acajatuba.


Ses couleurs vives jaune, bleu et rouge illuminent son écrin de verdure sauvage. Marilia a souhaité lui donner un air de fête à la brésilienne, tout en respectant la construction typique de la région, en bois et sur pilotis. Un endroit hors du temps qui respire l’authenticité.

Nous sommes accueillis par Deuzimar, notre guide francophone, et la sympathique et familiale équipe du lodge.


La saison des pluies est terminée, mais le niveau de l’eau va rester haut jusqu’à mi-août. Moyennant quoi, nous apercevons à peine les pilotis et surtout nous avons l’agréable sensation de vivre l’Amazonie en mode “Venise”. Avec des animaux exotiques en plus, que nous apercevons facilement depuis la terrasse à fleur d’eau : un iguane qui fait de la varappe sur un tronc d’arbre, des toucans joueurs, un paresseux qui se prélasse dans les branches, et les yeux jaune d’un caïman à la tombée de la nuit.


Le Manati dispose de trois chambres confortables décorées avec goût (douche et toilettes inside) qui ouvrent chacune sur une terrasse et un imposant hamac au bord de l’eau. Notre séjour s’annonce enchanteur en immersion totale durant 4 jours et 3 nuits dans ce décor juste hallucinant.


Il fait très chaud et humide et nous ne tardons pas à faire notre premier plouf dans la rivière, avant d’embarquer à nouveau sur une pirogue à la rencontre de la « forêt enchantée ».

De grands arbres émergent de l’eau immobile comme des géants pétrifiés, sous une lumière filtrée par la voûte végétale. Ici, le silence est absolu. Dans ce décor surréaliste, je me suis beaucoup amusé à observer Isa pêcher le piranha, sur un canot brinquebalant perdu au milieu de la forêt. Et cela d’autant plus que j’ai quand même réussi à en sortir un de l’eau !


Mais ce qui était encore plus sympa, c’était de dévorer le produit de notre pêche le soir même au lodge. Il n’y avait pas grand-chose à manger dans le piranha mais l’expérience fut grisante.



Après le dîner, à bord d’une pirogue, nous sommes allés chasser le caïman dans la nuit noire.

Nous avons pu apprécier la dextérité de Deuzimar pour attraper la bête avec ses deux mains, armé seulement d’une lampe torche. Dans le noir, il repère les yeux jaunes de l’animal planqué dans la mangrove. Le faisceau lumineux hypnotise le caïman qui se laisse alors approcher sans sourciller. Le talent de notre guide expérimenté fera le reste.

Le lendemain matin, après un somptueux p’tit déj, nous empruntons un igarapé à bord d’une petite pirogue à moteur et nous filons à travers la magnifique forêt inondée. Ce petit bras de fleuve n’apparait que l’hiver, lorsque les eaux amazoniennes sont au plus haut et qu’elles permettent la formation d’un véritable réseau de canaux naturels. Tous ne sont pas navigables et la plupart disparaissent l’été avec la décrue.

A cet endroit, le silence est extraordinaire, seul le bruissement du vent dans les arbres et le claquement sec des ailes d’un oiseau vient troubler le calme absolu du lieu. L’eau est calme et semble immobile, se transformant en un miroir pour la riche végétation équatoriale.

Nous atteignons bientôt le lac Acajatuba, beaucoup plus large et navigable en toute saison, avant de visiter un petit village sur la terre ferme, où les « caboclos » préparent la farine de manioc, qui est un aliment omniprésent sur les tables familiales de la région.


Lors de la dégustation du célèbre tapioca aux noix du Brésil dans une « Casa de Farinha », nous avons fait deux incroyables rencontres…

Oui, c’est un vrai anaconda !


Je n’aurais jamais imaginé vivre une telle expérience, sous l’œil attentif du chef du village qui m’a encouragé et aidé à prendre la bête dans mes mains. Un grand moment d’émotion !



Isa a préféré s’amuser avec deux sympathiques paresseux : un bébé bien accroché à sa mère !




La placidité, la lenteur nonchalante et la jovialité de cet animal sont vraiment étonnantes. On n’y résiste pas !

Le lendemain matin, réveil à 5h30 aux chants de la nature pour une autre sortie qui restera gravée longtemps dans notre mémoire. Nous partons assister au lever du soleil sur le Rio Negro. Nous empruntons à nouveau un igarapé à bord d’une petite pirogue à moteur et nous filons à travers la forêt inondée au milieu du lac Acajatuba.








Après ce spectacle hallucinant, il est temps de retourner au Manati pour y prendre notre super p’tit déj, avant de repartir pour un trekking nature sur un sentier de découverte de l’écosystème, dont les vertus médicinales et cosmétiques des plantes et des arbres.



Isa s’en donne à cœur joie de tester les bouts d’écorce ou les feuilles que Deuzimar lui tend. Ici, elle se badigeonne de cette sève blanche considérée comme un remède idéal pour lutter contre l’arthrose et bon pour les articulations, là elle s’extasie devant cette poudre d’écorce qui s’enflamme à même le tronc et qui sert aux indiens évidemment pour faire du feu le plus naturellement du monde. Les explications passionnées de Deuzimar nous donnent les secrets de la grande forêt. Les arbres, les lianes et les plantes sont des remèdes médicaux, 100% naturels. La moindre feuille et le moindre bout d’écorce sont une invitation à la découverte de la pharmacopée des Indiens.

Quel pied de se lever avec le soleil pour s’aventurer à l’intérieur de cet écosystème unique, où nous ressentons la forte densité de la faune et de la végétation dans un calme absolu. Prisonniers de la canopée, nous avançons dans un lieu à priori hostile à l’homme. Nous marchons dans ce canevas de lianes vampires qui asphyxient les arbres de leurs étreintes. Nous sommes en alerte permanente, aux aguets du moindre signe de vie animale. Des singes hurleurs et voltigeurs se balancent à vive allure et de liane en liane tandis que de magnifiques aras se chamaillent à la cime d’un arbre. Dans ce décor hallucinant, je ressens pleinement l’instant présent où tout retrouve du sens et de la valeur.

Isa n’a pas hésité une seconde à goûter les grosses limaces blanches du coin, fortement encouragée par Deuzimar.

Aujourd’hui, une autre expérience sensationnelle nous attend. Nous partons nager avec des dauphins roses ! Non, non, je ne suis pas sous « exta », il y a bien des dauphins d’eau douce en Amazonie : les « botos vermelhos » ou « botos cor de rosa ». Et il se trouve qu’ils sont roses.




J’en profite pour rendre hommage à Deuzimar qui a su nous faire partager sa parfaite connaissance de la forêt en y ajoutant un supplément d’âme. Nous avons également beaucoup apprécié l’ambiance familiale du lodge et les bons petits plats préparés par Marilia et sa mère. Le Manati Lodge est une fenêtre ouverte sur la douce Amazonie de mon imaginaire. Je souhaite à tout le monde de vivre une telle expérience.
